S’intégrer par le prénom, vraiment ? Cela n’a pas aidé Benalla

Aussi odieuse soit-elle, la proposition d’un certain polémiste d’extrême-droite d’obliger les immigrés à donner à leurs enfants des prénoms “français” semble trouver un certain écho chez divers braves gens qui ne sont pas particulièrement racistes, mais qui n’ont probablement pas beaucoup d’amis appelés Mohamed. Ils pensent même que ce serait une façon de les aider : pour que ces enfants “s’intègrent” mieux, qu’ils soient moins en butte au rejet…

Bref, plutôt que de lutter contre la xénophobie, on lutte contre la différence. C’est plutôt mesquin. Mais est-ce qu’il y a du vrai là-dedans ? Est-ce qu’un prénom a un tel poids ?

Par chance, nous n’avons pas à chercher bien loin : ce qu’on appelle l’affaire Benalla nous a tous rendus familiers avec le cas d’un enfant d’immigrés marocains au prénom tout ce qu’il y a d’européen, et même classique : Alexandre. Le but était de protéger l’enfant d’un enlèvement par son père (les parents étant séparés et en conflit) mais aussi de l’aider à s’intégrer dans la société française.

La suite est bien connue : le jeune Alexandre Benalla, issu de la ZUP de La Madeleine à Évreux, s’intéresse à la sécurité, fait un stage au Service de protection des hautes personnalités, suit une formation de gendarme réserviste, puis entre au service d’ordre du Parti socialiste. Il sera amené au cours des années à être garde du corps de Martine Aubry, François Hollande… En 2016, il s’engage auprès d’Emmanuel Macron, qui lance son mouvement En Marche, et intègre l’équipe chargée de la protection du président.

Il est difficile de dire si ce prénom d’Alexandre a aidé ou non Benalla dans son ascension sociale. Mais une chose au moins est sûre : une fois que l’affaire de la rue de la Contrescarpe a été connue, il n’a été d’aucune utilité à son protagoniste, vite renvoyé à ses origines  : une “racaille de banlieue” de plus, qui ne pouvait être entré au service du président à moins d’avoir des moyens de pression occultes.

Qu’on se souvienne des rumeurs sur une cellule de barbouzes de l’Élysée, voire sur une liaison homosexuelle avec le président. Tout était devenu imaginable, sauf qu’un petit gars de banlieue, fils d’immigrés marocains, puisse décrocher un job prestigieux, grâce à un peu de chance et une bonne dose de ténacité. Et les gens sagaces de disséquer sa vie, son passé, de pointer a posteriori les signes qui auraient dû alerter sur sa tendance à jouer les cowboys. Tout cela pour conclure que non, décidément, “Benalla” n’avait pas sa place au Château, n’est-ce pas. Il aurait dû rester dans sa banlieue.

Alexandre ? Quel Alexandre ?

Ceux qui viennent doctement disserter sur l’utilité des prénoms pour l’intégration ont vite oublié celui-là.

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