Les médias n’ont pas la partie facile avec des candidats populistes du genre de Trump, Berlusconi ou Zemmour : venus du monde des médias eux-mêmes, ils savent très bien comment les manipuler afin de rester dans la lumière. Même quand il n’a rien à dire de neuf, comme dans une banale cérémonie de vœux, le populiste s’arrange pour choquer par sa façon de le dire, ce qui attire des réactions en cascade et le remet au centre de la conversion sans qu’il ait eu à faire la moindre proposition. Un cercle vicieux que j’évoquais récemment ici. Comment faire, alors ? Une possibilité : prendre du recul, ne pas regarder uniquement là où le manipulateur veut nous voir regarder.
C’est ce qu’a fait ici Yann Barthès, pour Quotidien : il a regardé non pas ce que contenait le “programme” du candidat sur les thèmes de l’éducation et de la justice, mais sur combien de pages ils tenaient. Et c’est édifiant. Il n’y a pas de programme, juste une collection de poncifs passéistes qui a bien de la peine à remplir… quinze lignes !
Le cancre a bâclé son devoir. Et c’est là qu’on voit à quel point cette candidature est un miroir aux alouettes. Il n’y a pas de projet, juste du bla-bla, de la surface médiatique, des mots-clefs pour faire le buzz. Devenir président ? Le polémiste y croit peut-être, son égo est assez démesuré pour ça. Mais je parierais qu’aucun de ses sponsors, de Bolloré à Poutine, n’est dupe. Cela confirme ce dont on se doutait : le véritable but de la manœuvre est de rendre impossible une victoire de la droite sans l’extrême-droite, en vue d’une réorganisation de cette famille politique. Faire des Républicains l’équivalent du Parti Républicain US, avec un programme ethno-nationaliste et chrétien conservateur. (D’où les références permanentes aux croisades, jusque dans le nom du “mouvement” Reconquête.)
Bref, il aurait aussi bien pu mettre comme “propositions” sur son site le menu de la cantine de CNews. Vu le rôle prévu, cela aurait aussi bien fait l’affaire.
